.: le Toit :. Chat perché [ PV. Sora ]

La journée n'était guère des meilleures pour Neji. Il avait appris qu'il devrait remballer son pack, pour séjourner dans une autre aile de l'internat, dans une chambre avec deux autres colocataires ... visiblement.

Lui qui n'était pourtant pas hostile à un peu de compagnie, a dire vrai, était bien heureux de gouter à la solitude de son ancienne chambre. A croire qu'il avait collé ça et là, quelques talismans pour éloigner les étrangers en mal d'aventure. Enfin ... il fallait s'y conformer.

Et c'est au cours de la pause du déjeuner, qu'il regagna l'un des lieux qu'il affectionnait le plus, car le cadre était idéal pour quelques clichets lumineux : le toit du lycée.

Panorama idéal de la vie étudiante ... enfin, à travers la grande grille, garde-fous pour les suicidaires ou les victimes de brimades. La mort ... un sujet qui ne passionnait guère notre idéaliste chaotique.

* Humph, cet uniforme me soule ... j'ai bien envie de venir avec mes autres fringues au moins une fois ... bahh ... * persifla t il entre ses dents serrées d'une rage ponctuelle.

Il fit un saut tant bien que mal sur le toit de la cage d'escalier, afin que son champ de vision ne soit plus encombré par les branches de métal tordues et où la rouille faisait sagement son oeuvre.

Son étui cylindrique sur le dos, ainsi que son sac kaki à moitié déchiré, en bandoulière, il en sorti de ces deux, son matériel de photographie adéquat ainsi qu'un sandwich au thon mal habilement emballé et une petite bouteille d'Evian.

Son poignet gauche lui faisait mal, et sa main glissa nerveusement dans la poche de son pantalon pour en retirer deux anti-douleur, sous forme de dragées.

Le pic-nique improvisé devança sa séance, et avec une seule main clairement valide, il fallait faire une concession. Manger ( ou être mangé XD ) ou s'adonner à la contemplation des éphèbes post-pubers qui jonchaient le sol, tels de petites fourmis serviles.

Ses pensées vagabondaient entre vide stellaire, et idées écorchées ... qu'allait il vivre cette année. Loin des 'siens' ... loin des autres, mais plus proche que jamais de lui même.

Dérangé par un bruit sourd au sein des escaliers, il n'allait pas tarder à voir apparaître de haut, la silouhette d'un(e) sinistre étranger(e).

Sora poussa un long soupir. La matinée avait été tout bonnement éprouvante pour lui. Entre sa note catastrophique en japonais, les abrutis de son année qui avaient cru bon de renserver un pot de peinture bleue sue la veste de son uniforme et sa chute dans les escaliers, alors qu'il avait bien évidemment un carton de vieilles éprouvettes en verre que le professeur de physique lui avait demandé de déplacer, il avait été servi. Et, en passant dans sa chambre à midi pour changer sa veste, il avait remarqué que le nom d'Akira avait disparu de la porte pour être remplacé par un autre. Qu'il n'avait évidemment pas retenu, trop pressé de se débarrasser de sa veste imbibée de peinture. Il faudra d'ailleurs qu'il pense à aller la déposer à la buanderie avant de se coucher.

Bref, le jeune androgyne avait réussi à trouver l'accès au toit. Il avait, encore une fois, manqué de se casser la figure en grimpant les escaliers, butant au passage contre de vieilles caisses de ferraille en provoquant un joli bleu sur sa hanche, avant de pouvoir finalement atteindre le lieu tant désiré avec un chapelet de jurons tous plus atroces les uns que les autres. Envers sa classe, son équilibre précaire, les caisses des escaliers, Kami-sama lui-même... Enfin c'était la joie, quoi.

Sora tira une sucette de la poche de son pantalon, la déballant avec soin. Verte, en forme de petite guitare. Il la fourra dans sa bouche sans plus de cérémonie, poussant un petit soupir de soulagement. Les sucettes étaient sa drogue comme les cigarettes étaient la drogue de milliers de personnes sur la planète. Mais les sucettes étaient moins nocives que ces petits cylindres de tabac à la fumée dévastatrice, alors il n'allait pas se priver de dévorer ses friandises favorites quand il en avait envie...

Le jeune homme blond leva subitement la tête du bout de ses chaussures, comme pris d'une intuition. Ses yeux noisette fouillèrent un instant l'endroit avant de tomber sur une silhouette, posée un peu plus haut. Un garçon. Qu'est-ce qu'il fichait là... ?

C'est au milieu d'une bouchée de pain habilement maitrisée afin qu'elle ne se répande pas sur le sol, que Neji fut interrompu dans son repas par l'arrivée inattendue de l'un de ses camarades.

Son physique et ses traits épurés attira l'attention du jeune photographe, ni en bien, ni en mal, seulement interpellé par son vis à vis. Ou plutôt, la personne qu'il dominait du regard, tel un chat de goutière du haut de son royaume élevé.

Détaillant sa venue, entre le bruit sourd qu'il entendit, ainsi que l'affection sur l'instant qu'il avait pour les sucreries ... chose qu'il n'affectionnait pas particulièrement. Ravalant sa salive, et se grattant l'oreille droite du bout de l'index il offrit à l'étranger un salut de la main, en agitant son sandwich avec parcimonie et ajouta au geste un : " Hi ... j'pensais être seul en général ici, à part les couples ou les Hikikomoris ... "

L'idée ne lui serait certainement pas venue de descendre se présenter en bonne et due forme ... après tout il n'était pas un fils de bonne famille ... il avait juste un père absent assez friqué, les bonnes manières, et les moeurs ... à part celle de cacher sa sexualité tant bien que mal, n'étaient pas son fort.

De plus, il avait commencé à déballer ses affaires, et passa son sandwich de sa main droite viable et dextre, à la gauche, pour réserver son doigté minutieux au réglage de son trépied. Il marmonnait dans sa barbe, tout en continuant son déjeuner.

Sora retira lentement sa sucette de sa bouche, laissant ensuite son bras retomber le long de son corps. L'un de ses sourcils fila vers le haut tandis qu'il basculait délicatement la tête sur le côté, ses cheveux brillant soudainement d'un éclat doré sous un rayon du pâle soleil de cette journée à fiche à la poubelle. Ses yeux fardés de noir se plissèrent légèrement tandis que sa main libre se posait sur sa hanche, l'une de ses plus longues mèches or chatouillant son coude. Il lui semblait qu'il avait déjà vu ce garçon quelque part dans l'internat... Mais où, impossible de s'en rappeler. Le jeune androgyne finit par se redresser, massant au passage sa hanche douloureuse, relevant légèrement sa chemise pour en vérifier la couleur. Bleue. Comme un Schtroumpf. Génial, heureusement qu'il avait de la crème tiens...

- Hmm, salut... Faut croire que t'es pas seul à chercher un peu de calme, répondit-il à la salutation de l'autre garçon, frottant du bout des doigts son superbe bleu.

Une grimace déforma les lèvres charnues de Sora lorsqu'un éclair de douleur le traversa. Il prit soin de s'adosser à un mur non loin, plaquant ses doigts froids contre la source de la douleur, poussant un léger soupir soulagé. Ses yeux noisette se relevèrent vers le deuxième garçon, le dévisageant. Du moins, du mieux qu'il pouvait depuis l'endroit où il était.

- J'suis sûr de t'avoir déjà vu quelque part...