Liberty, dear liberty... [FREE ~]

Une petite voiture noire se gara soigneusement sur le parking de l'internat Moriguchi. Le moteur fut coupé, la portière avant, côté passager, s'ouvrit. Une jeune femme menue, aux boucles blondes ramenées dans une coiffure compliquée et en même temps d'une simplicité enfantine, vêtue d'une robe rouge et blanche brodée de fil d'or, en sortit. En deux mots, Aoyama Mikoto. Étrange de voir une jeune femme aussi raffinée, qui semblait sortir tout droit de la Renaissance française, sortir d'une voiture n'est-ce pas ?

Mikoto referma la porte de son véhicule dans un claquement rapide, le contournant ensuite pour ouvrir le coffre d'un geste souple. Elle en tira une grande valise, d'apparence tout aussi raffinée que sa propriétaire, qu'elle mit sur ses roulettes avant de refermer le coffre et verrouiller son véhicule. Ses anglaises blondes rebondirent autour de son visage lorsqu'elle se mit en marche, se balançant en cadence. Quelques minutes plus tard, la porte du bâtiment se refermait sur elle.

La jeune femme opta tout d'abord pour l'administration. Ainsi, elle eut une brève rencontre avec le proviseur afin d'obtenir ses fonctions d'infirmière avant de, à nouveau, se retrouver dans le hall de l'établissement. Elle laissa son regard azur s'y balader un long moment. Tout cela la changeait du petit appartement encombré et sale qu'elle partageait avec son père il y avait encore quelques heures... Un bref soupir s'échappa des lèvres roses de Mikoto tandis qu'elle fermait un instant les yeux. Elle empoigna sa valise d'une main, attrapa un pan de sa robe de l'autre et, prudemment, commença à monter les marches pour avoir une vue d'ensemble de la gigantesque pièce. Hum. Il lui faudrait du temps pour s'habituer à autant d'espace.

Sur la route longeant les limites de l'internat Moriguchi, un taxi à l'aspect légèrement miteux semblait avoir du mal à dépasser les soixante kilomètres à l'heure . Il réussit néanmoins à se garer sur le parking du lycée, et une adolescente en sortit en claquant la porte d'un geste énervé .
Oui, car Naoko avait dû supporter les blablas incessants du chauffeur pendant près de vingt minutes, sans réussir à le faire taire . Le pauvre homme devait être soit aveugle et sourd face aux soupirs et autres yeux au ciel de l'adolescente, soit totalement imperméable aux marques d'exaspération à son égart .
La jeune fille se dirigea vers l'arrière du taxi, ouvrit le coffre et en sortit une valise qui ne semblait qu'à moitié pleine . Elle se dirigea ensuite sans un regard vers l'entrée de l'internat qui allait devenir son futur lycée . Elle leva un instant les yeux pour contempler le manoir, avant de se décider à y rentrer .

Une fois à l'intérieur, Naoko s'arrêta au milieu du hall . Car tout autour d'elle s'élevait une entrée à l'aspect ... Ecrasant, oui, c'est le mot . Tout d'abord par son immensité . Ensuite par la beauté du lieu .

" La vache ... ", souffla-t-elle en levant le nez .

Reprenant ses esprits, Naoko attrapa à nouveau sa valise et se dirigea vers les escaliers qui lui faisaient face . C'est après avoir mit le pied sur la deuxième marche qu'elle remarqua une jeune femme un peu plus haut .
La jeune femme en question semblait tout droite sortie d'une autre époque, avec ses anglaises blondes et sa robe rouge . Oui, une digne représentante de la Renaissance française . Et c'est précisement à cause de cette femme que Naoko manqua une marque et s'étala de tout son long dans l'escalier .

" K'soooooo !", hurla-t-elle sans se soucier de la présence de la jolie blonde .

Les yeux bleus de Mikoto s'étaient immédiatement braqués sur l'entrée lorsqu'elle avait entendu la porte s'ouvrir. Ce fut une jeune fille qui entra, avec de longs cheveux bruns et lisses. La nouvellement infirmière pencha légèrement la tête sur le côté, détaillant longuement la jeune qui s'avançait vers le grand escalier sans, apparemment, l'avoir remarquée. Du moins pas avant la deuxième marche d'escalier, où ses yeux sombres se posèrent sur le visage de l'infirmière blonde. Cette dernière ne détourna pas le regard, l'air impassible de celle qui à l'habitude de se faire détailler sur le visage. Sa main fusa toutefois immédiatement en voyant la jeune fille partir en arrière avec un juron, agrippant son bras pour ensuite la tirer vers elle. Le tout ne l'avait même pas décoiffée, malgré le fait qu'elle replaça une mèche correctement dans son chignon, tout à fait blasée.

Mikoto reposa de nouveau son regard azur et perçant sur la nouvelle arrivante, la toisant longuement. Bon. C'était une jeune fille, premier bon point. Elle ne s'embarrassait pas de soucis de politesse devant une inconnue, deuxième bon point. Elle allait lui plaire, la petite, elle le sentait.

- Ca va tes chevilles ? daigna-t-elle finalement demander en baissant les yeux sur les jambes de la jeune brune.

Sa voix claire et cristalline résonna dans le hall comme un bruit de clochette. Non, vraiment, elle ne semblait pas du tout débarquer du XXIe siècle japonais. Tout dans ses manières, son style vestimentaire et même sa voix faussait les estimations. Mais en ce cas-là, elle serait drôlement bien conservée... Hum, je m'égare, je m'égare.

Un peu sonnée par le semblant de chute auquel elle avait faillit faire face, Naoko regarda la jolie blonde lui porter secours . Oui, décidement, la place de cette blondinette aux anglaises ne devrait pas être au beau milieu d'un internat japonais, plutôt dans un tableau de la Renaissance française .
Lorsque sa "sauveuse" parla, l'adolescente ouvrit de grands yeux ronds ; la jeune femme avait une voix cristalline parfaitement accordée avec son apparence, mais pas moins étonnante .

" Ca va tes chevilles ? "

Enfin assise sur les marches, Naoko mit un certain temps à remettre ses idées en place . C'est à ce moment qu'elle sentit une petite douleur à sa cheville gauche . L'adresse et elle faisaient vraiment trois .

" Eto ... Ch'uis pas sûre ... Itai ! "

Oui, car intelligente et futée comme elle était, Naoko venait d'essayer de bouger son pied . Une grimace tordit son joli visage tandis qu'elle aggripait sa cheville .
Levant les yeux en essayant d'oublier la douleur, l'adolescente aperçut sa valise, deux mètres plus loin, ouverte . Naoko poussa un juron et se leva en sautant à cloche-pied . Elle était têtue et bête, ce qui expliquait le fait que savant pertinemment que sa cheville avait un problème, celà ne l'empêchait pas de se mettre debout et d'entreprendre de ramasser ses affaires .

La jeune fille en avait presque même oublier la présence de l'inconnue derrière elle, qui devait bien la prendre pour une imbécile entêtée et parfaitement ... débile ? C'était sans doute ce qu'elle était . Mais le fait est que débarquer dans un lycée, se casser la tronche, se faire mal à la cheville et étaler ses fringues au milieu du hall dudit lycée n'était sans doute pas recommandé, et que Naoko détestait se faire remarquer - même si pour le coup, c'était vraiment raté .

Mikoto se contenta de suivre la jeune fille du regard en poussant un long soupir. A peine arrivée et déjà, elle avait une élève blessée sur les bras. Avec un nouveau soupir, plus bref celui-ci, elle remonta les larges manches rouges brodées d'or de sa robe pour ensuite soulever la brune en l'attrapant par la taille. Heureusement que son mètre soixante-quinze l'aidait. En tout cas elle la posa en position assise sur l'une des marches de l'escalier, soulevant ensuite délicatement le tissu de son pantalon. La peau avait viré au bleu Schtroumpf.

- Bouge pas d'ici.

La jeune infirmière grimpa les quelques marches qui la séparaient de sa valise, en tirant une impressionnante trousse de soins. Elle la ramena près de la jolie brune, l'ouvrit et, finalement, en tira un tube de crème et de quoi bander le tout. Ses doigts débouchèrent le tube de crème avant de délicatement appliquer une noisette de la substance blanche sur la peau bleuie, frottant lentement, en quelques cercles réguliers. Après quoi elle attrapa la bande pour en entourer la cheville et le pied de la nouvelle élève en quelques gestes souples, rapides et précis, serrant correctement le bandage ainsi formé.

- Juste une foulure. Si dans une semaine c'est pas passé, tu viens à l'infirmerie.

Alors qu'elle ramassait tranquillement ses affaires, Naoko se sentit soulevée dans les airs et assise à nouveau sur les marches . Surprise, l'adolescente lâcha la trousse de toilette qu'elle avait attrapé et suivit la jolie blonde des yeux lorsqu'elle remonta les escaliers et sortir de sa propre valise ... Une énorme trousse de secours .
Une infirmière ? A voir la façon dont elle commença à s'occuper de la cheville couleur Schtroumf de Naoko, il y avait de grandes chances . On ne voit pas souvent de gens trimballer une trousse de secours énorme comme un sac de voyage (je sais j'exagère ._.) dans sa valise .
Sa cheville lui faisant mal, Naoko resta silencieuse et laissa faire la blondinette . Une fois le bandage posé, l'adolescente détacha son regard de sa jambe pour fixer la jeune infirmière .

"Juste une foulure. Si dans une semaine c'est pas passé, tu viens à l'infirmerie."
"Alors comme ça dès le premier jour je tombe sur l'infirmière ?" lança l'étudiante .

Naoko savait déjà qu'elle n'était pas chanceuse . S'être cassé la tronche au milieu du hall en arrivant ne l'étonnait donc guère . Se fouler la cheville, non plus . Mais se faire remarquer par l'infirmière comme une sorte de grosse maladroite le premier jour, non, ça, elle ne s'y attendait pas .

Mikoto ne répondit pas immédiatement. Elle prit le temps de ranger la crème qu'elle avait utilisée puis d'attraper une petite lingette pour essuyer ses doigts couverts de la substance blanche avec soin, la roulant ensuite en boule pour se relever et la jeter dans l'une des poubelles proches. Après quoi elle revint près de la jeune brunette pour refermer sa trousse de secours avec soin et la remettre tranquillement dans sa valise.

- Estime-toi heureuse d'être tombée sur moi plutôt qu'un élève ou un professeur incapable de reconnaître une foulure d'une cheville cassée...

Sa voix tinta, petite clochette dans le silence du hall, tandis qu'elle refermait le zip de sa valise pour ensuite la remettre sur ses roulettes. Après quoi elle tendit la main à la jeune élève pour la remettre sur pied, passant son bras autour de sa taille afin de l'inciter à s'appuyer le plus possible sur elle, histoire d'éviter d'abîmer sa cheville plus que nécessaire. Ce serait dommage de refaire un saut à l'infirmerie pour, justement, un os cassé.

- Aoyama Mikoto. Infirmière de mon état.

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